Que devient Jérôme Cahuzac ?Pierrot Patrice/ABACAabacapress
Banni du monde politique en 2013 et condamné par la suite pour "fraude fiscale" et "blanchiment de fraude fiscale", l'ex-ministre du Budget sous François Hollande n'a plus fait parler de lui pendant des années.
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C'était il y a un peu plus de 10 ans. Le 2 avril 2013, l'ex-ministre du budget de François Hollande se décidait à passer aux aveux après avoir été accusé d'évasion fiscale par Médiapart. Oui, il détient un compte non déclaré à l'étranger, depuis une vingtaine d'année. L'affaire, qui a éclaté le 4 décembre 2012 après les révélations du journal d'investigation, sera le scandale le plus retentissant du quinquennat Hollande. La justice ne tranchera qu'en décembre 2016 : Jérôme Cahuzac est condamné à trois ans de prison ferme et à cinq ans d'inéligibilité pour "fraude fiscale" et "blanchiment de fraude fiscale", avant un appel en 2018 qui réduira sa peine à deux ans de prison ferme et deux ans avec sursis. Il échappera finalement à la prison grâce à un aménagement de peine avec bracelet électronique, bracelet dont il a été libéré en décembre 2020. 

Un homme "serein"

A 71 ans, l'ancien ministre et maire de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne) réside en Corse. Après avoir suspendu son autorisation d'installation sur l'île, l’ordre des médecins a finalement autorisé Jérôme Cahuzac à exercer la médecine générale en 2019. Durant la crise du Covid-19, il a officié à l’hôpital de Bonifacio, notamment pour faire des remplacements. Aujourd'hui libre de ses mouvements, il a cessé son activité médicale et ne travaille plus, sauf lorsque l’hôpital de Bonafacio en exprime la demande, selon La Dépêche en 2022. "Jérôme Cahuzac est fidèle en amitié", avoue l’un de ses amis villeneuvois. "Il garde quelques rares contacts avec le Lot-et-Garonne, avec des intimes. Il y a quelques coups de téléphone épisodiques, mais la page est clairement tournée. Villeneuve, la politique, les affaires, tout cela est terminé, il a payé." Jérôme Cahuzac est aujourd’hui "un homme serein".

Se libérer de la "haine"

En février 2022, il sort du silence et accorde une interview à David Pujadas sur TF1. Il se présente comme "un citoyen comme un autre, qui a purgé sa peine, payé sa dette", mais qui "ne pense pas avoir d'excuses" et souhaite désormais "tourner la page". Pourquoi s'exprime-t-il soudain ? "Si j’ai accepté cette invitation, c’est pour essayer de m’expliquer, pour dire que je comprends cette condamnation". (...) "J’ai été banni à l’intérieur de mon pays pendant quelques années, j’aimerais que ce ne soit pas un bannissement à perpétuité", a-t-il plaidé, se demandant si "la société est assez forte" pour le "ré-accueillir dans son sein". "Je demande vraiment humblement que la page se tourne enfin, j’aimerais me libérer de la haine dont j’ai le sentiment d’être l’objet parfois, mais aussi libérer ceux qui l’éprouvent en leur disant : ce n’est plus la peine, ça ne sert à rien, c'est sans objet aujourd’hui", a-t-il insisté. 

Passe d'arme avec Mediapart 

L'ancien ministre garde toutefois une rancune tenace à l'égard de son vieil ennemi Edwy Plenel, cofondateur de Mediapart, le média même qui a enclenché "l'affaire Cahuzac" par ses révélations en 2012. Alors qu'en 2023 a été révélé le rachat des parts d' Edwy Plenel par Mediapart pour 2,9 millions d'euros, l'ex-ministre du Budget, en a profité pour donner une leçon d'éthique capitaliste : "Racheter des actions pour une entreprise peut être considéré comme la quintessence du libéralisme dévoyé. L'entreprise fait la fortune de ses actionnaires plutôt que de se développer, et en restreignant le capital disponible sur le marché protège les actionnaires qui ont donc les avantages de la libre entreprise sans prendre de risques."